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Je voudrais m’unir intimement à vous, et je ne puis atteindre à cette ineffable union.

Je voudrais m’attacher aux choses du ciel, et mes passions immortifiées me replongent dans celles de la terre.

Mon âme aspire à s’élever au-dessus de tout, et la chair me rabaisse au-dessous, malgré mes efforts.

Ainsi, homme misérable, j’ai sans cesse la guerre au dedans de moi, et je me suis à charge à moi-même[1], l’esprit voulant s’élever toujours, et la chair toujours descendre.

5. Oh ! combien je souffre en moi lorsque, méditant les choses du ciel, celles de la terre viennent en foule se présenter à ma pensée durant la prière ! Mon Dieu, ne vous éloignez pas de moi, et n’abandonnez point votre serviteur dans votre colère[2].

Faites briller votre foudre, et dissipez ces visions de la chair : lancez vos flèches[3], et mettez en fuite ces fantômes de l’ennemi.

Rappelez à vous tous mes sens ; faites que j’oublie toutes les choses du monde, et que je rejette promptement, avec mépris, ces criminelles images.

Éternelle vérité, prêtez-moi votre secours, afin que nulle chose vaine ne me touche.

Venez en moi, céleste douceur, et que tout ce qui n’est pas pur s’évanouisse devant vous.

Pardonnez-moi aussi, et usez de miséricorde, toutes les fois que, dans la prière, je m’occupe d’autre chose que de vous.

Car je confesse sincèrement que la distraction m’est habituelle.

Dans le mouvement ou dans le repos, bien souvent je ne suis point où est mon corps, mais plutôt où mon esprit m’emporte.

Je suis là où est ma pensée, et ma pensée est d’ordinaire où est ce que j’aime.

  1. Job. vii, 20.
  2. Ps. lxx, 13 ; xxvi, 9.
  3. Ps. cxlii, 6.