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doux chant des hymnes ; tout cela aide peu et ne touche guère quand la grâce se retire, et que je suis délaissé dans ma propre indigence.

Alors il n’est point de meilleur remède qu’une humble patience, et l’abandon de soi-même à la volonté de Dieu.

7. Je n’ai jamais rencontré d’homme si pieux et si parfait, qui n’ait éprouvé quelquefois cette privation de la grâce, et une diminution de ferveur.

Nul Saint n’a été ravi si haut ni si rempli de lumière, qu’il n’ait été tenté avant ou après.

Car il n’est pas digne d’être élevé jusqu’à la contemplation de Dieu celui qui n’a pas souffert pour Dieu quelque tribulation.

La tentation annonce d’ordinaire la consolation qui doit suivre.

Car la consolation céleste est promise à ceux qu’a éprouvés la tentation. Celui qui vaincra, dit le Seigneur, je lui donnerai à manger du fruit de l’arbre de la vie[1].

8. La consolation divine est donnée, afin que l’homme ait plus de force pour soutenir l’adversité.

La tentation vient après, afin qu’il ne s’enorgueillisse pas du bien.

Car Satan ne dort point, et la chair n’est pas encore morte : c’est pourquoi ne cessez de vous préparer au combat, parce qu’à droite et à gauche sont des ennemis qui ne se reposent jamais.

RÉFLEXION.

Bien que l’humanité sainte du Sauveur ne cessât de jouir, par son intime union avec le Verbe divin, d’une paix et d’une joie inaltérables, il ne laissait pas de ressentir souvent, dans la partie inférieure de l’âme, les afflictions et les douleurs devenues l’apanage de notre nature depuis le péché. Qui n’a présentes à l’esprit ces grandes paroles : Mon âme est triste jusqu’à la mort[2]. Mon père ! mon père ! pourquoi m’avez-vous délaissé ? [3] Ansi l’âme chrétienne, sans perdre sa paix, est éprouvée aussi par la tristesse et les tribulations in-

  1. Apoc. ii, 7.
  2. Matth. xxvi, 38.
  3. Matth., xxvii, 46.