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Il n’y a qui que ce soit, fût-il Roi ou Pape qui n’ait à souffrir en ce monde.

Qui est donc le plus heureux ? c’est celui qui peut endurer quelque chose pour l’amour de Dieu.

Les gens grossiers & imparfaits ont accoûtumé de dire : ô que cet homme est à son aise ! qu’il est riche ! qu’il est puissant ! qu’il est élevé !

Considerez la gloire du Paradis, & vous verrez que tous les biens temporels ne sont que des biens en idée, qu’on n’est jamais seur de les conserver long-tems ; que souvent même ils sont à charge à ceux qui les ont, parce qu’on ne peut les posseder sans inquiétude, & sans crainte de les perdre.

Ce qui fait notre bonheur sur la terre, ce n’est point la grande abondance de ces sortes de biens : la mediocrité nous suffit.

Certainement c’est quelque chose de bien pitoïable que la vie presente.

Elle n’a que de l’amertume pour les personnes qui veulent vivre, non selon la chair, mais selon l’esprit ; parce qu’ils connoissent & sentent mieux que les autres, la corruption de notre nature.

Car d’être contraint de boire & de manger, de veiller & de dormir, de travailier & de se reposer, en un mot d’être sujet à toutes les necessi-