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à se mépriser véritablement soi-même, à aimer mieux être méprisé, qu’honoré du monde.


CHAPITRE VIII.
Qu’il faut s’humilier en s’anéantir devant Dieu.
Le Disciple.

JE parlerai à mon Seigneur, quoique je ne sois que poudre & cendre[1]. Si je m’estime quelque chose de plus, vous me condamnez, ô mon Dieu, & mes pechez portent témoignage contre moi, sans que je puisse rien alleguer pour ma défense.

Mais si je m’abaisse & m’anéantis devant vous, si j’ai pour moi un véritable mépris, & que je me considére tel que je suis en effet, comme un peu de cendre & de poussiére ; vous me regardez d’un œil favorable, vous me faites part de vos dons, vous m’éclairez de vôtre lumiere, & toute l’estime que je puis avoir de moi, se perd dans la consideration de ma bassesse & de mon néant.

C’est là que vous me montrez ce que je suis, ce que j’ai été, ce que je suis devenu : c’est là que vous me faites un affreux portrait de moi-même : car je vois bien maintenant que je ne suis rien, & jusqu’ici je l’ai ignoré[2].

Si vous me laissez seul & sans appui, les forces me manquent : mais

  1. Gen. 18. 27.
  2. Psal. 72. 22.