Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T2.djvu/98

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Après le départ de Musset, Mme Sand se remit à travailler sans relâche. Elle écrivit d’abord les Lettres d’un voyageur, pour lesquelles je lui prêtai mon aide, en riant de m’y voir représenté comme un vieillard portant perruque. Elle écrivit ensuite Jacques. Elle écrivait très vite et sans rature pendant sept ou huit heures et envoyait ainsi à l’imprimerie son travail de premier jet. » Le docteur Pagello raconta oralement la même chose au docteur Garibaldi : « Elle écrivait sans jamais s’arrêter, sans faire aucune rature, et après avoir écrit une page, elle l’envoyait à l’éditeur sans même la relire. » Pagello, lorsqu’elle écrivait les Lettres d’un voyageur, l’aidait en lui fournissant les renseignements locaux. « Il lui convenait de me représenter de manière à ce que je ne fusse pas soupçonné d’être un successeur de Musset : et c’est pour cela qu’elle m’affubla d’une perruque et qu’un lot d’années vint me tomber sur les épaules, » dit Pagello à propos de ces Lettres où effectivement elle le représenta sous la figure d’un vieux médecin, ce que Pagello acceptait de bon cœur et avec indifférence. Mais il n’en était pas de même des proches et des amis du docteur, et surtout de son père, qui ne voyait rien moins que d’un bon œil pareil roman dans la vie de son fils et lui écrivit, à ce propos, une lettre très sévère, pleine des plus vifs reproches.

À l’occasion de cette lettre, racontons un fait curieux, montrant combien s’abusait George Sand, en nous assurant qu’elle était médiocre causeuse, taciturne, peu intéressante en société, qu’elle manquait d’esprit et de ressources, et que ses amis et connaissances, en le confirmant, ne nous disent que la moitié de la vérité. La vérité vraie est que, lorsque George Sand venait à rencontrer une personne qui lui fut sympathique, ou qu’elle voulait charmer ou con-