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fait le Cassandre et le gouverneur avec moi ce qui ne m’amuse guère[1]. » George Sand était alors très inquiétée aussi de ne recevoir aucune nouvelle de son fils Maurice et de ne pas savoir s’il était bien portant, elle s’inquiétait également de sa fille, qu’en son absence, son mari voulait mettre en pension. George Sand tâchait de s’y opposer par l’intermédiaire de son frère Hippolyte et de Boucoiran ; elle songea même à abréger son voyage et à retourner au plus vite à Paris. Mais elle ne pouvait quitter Venise : elle n’avait pas la somme nécessaire pour partir ; d’autant plus que l’argent que devait lui envoyer Salmon, le banquier de son mari, ne lui arrivait pas à la suite de quelque imbroglio ou de quelque retard. Il fallait donc travailler coûte que coûte, et le plus possible. Et avec tout cela, il n’y avait plus entre elle et Musset l’harmonie des beaux jours. Jusqu’à sa maladie, il avait passé son temps à Venise comme il l’avait fait à Florence ; les scènes orageuses devenaient plus fréquentes, alternant avec des trêves passionnées. « Il avait fait pleurer ces grands yeux noirs qui le hantèrent jusqu’à la mort, et il n’était pas accouru un quart d’heure après demander son pardon[2]. »

Mais bientôt George Sand eut à oublier tous ses chagrins et soucis pour un autre souci plus important encore ! La maladie de Musset que George Sand mentionnait comme légère dans sa lettre du 4 février prit le caractère le plus sérieux, et le poète fut bientôt à l’article de la mort.

Le 5 février, elle écrit à Boucoiran : « Je viens d’annoncer à Buloz l’état d’Alfred qui est fort alarmant ce soir, et en même temps je lui démontre qu’il me faut absolument

  1. Ce fragment de la lettre du 4 février est cité aussi (avec des coupures) par Arvède Barine.
  2. Arvède Barine, p. 65.