itinéraire, uniquement pour ne pas tomber dans l’erreur de Messieurs les biographes qui aiment à prendre les romans comme documents et ont pu faire ainsi se promener Musset et George Sand, à la suite de Fauvel et d’Olympe, ou de Laurent et de Thérèse, à la Spezzia et à Naples, où il n’ont jamais mis les pieds. Du reste, Lindau, qui reproduit toujours servilement Paul de Musset, s’éloigne tout à coup de son original en parlant du départ, et au lieu de la soirée brumeuse et des mauvais présages de toutes sortes[1] qui accompagnèrent ce départ dans le récit du frère, il nous dit qu’il s’est effectué dans la joie « par une gaie journée ensoleillée du mois d’octobre » (?!)
George Sand écrivit à son fils de Marseille, le 18 décembre, sa première lettre, dans laquelle elle lui dit qu’ils ont jusque-là voyagé sans relâche[2]. À Marseille, ils restèrent jusqu’au 22, d’où il partirent pour Gênes. L’album de voyage de Musset renferme quelques dessins très curieux représentant George Sand dans des attitudes toutes différentes : fumant tranquillement sa cigarette sur le tillac, tandis que Musset a l’air penaud d’un homme qui souffre du mal de mer ; ailleurs Musset représente sa compagne en costume de voyage, achetant un bibelot dans une boutique de bric-à-brac, puis en toilette d’appartement, encore plus loin costumée en Turque et fumant la chibouque ; ou encore souriante, un éventail à la main. Sur le bateau du Rhône, les jeunes gens rencontrèrent Beyle (Stendhal, l’auteur de Rouge et Noir), et, à ce qu’il semble, ils passèrent gaiement le temps avec lui, quoique George Sand ne partageât guère ses goûts ni ses idées. Le voyage commençait très agréablement.