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« abaissée » jusqu’à aimer un pianiste, n’oublia cependant jamais la haute position qu’elle avait occupée faubourg Saint-Germain ; celle-ci, quoique « cousine » de Charles X, parla toujours le plus volontiers de l’origine plébéienne de sa mère, et n’oublia jamais de rappeler qu’elle n’appartenait à aucun autre pays que la verte Bohême, la patrie de la liberté et des artistes. Inutile de prolonger davantage la comparaison entre les deux femmes. On trouve dans le livre de Lina Ramann ample matière à faire de ces comparaisons, ad infinitum.

La correspondance, les œuvres et le sort ultérieurs des deux écrivains sont d’ailleurs assez significatifs par eux-mêmes. Quoi qu’il en soit, en 1835, elles s’imaginaient être devenues amies, et elles passèrent plusieurs années dans cette erreur jusqu’au moment où elles se brouillèrent enfin, à l’occasion de l’amour de Chopin pour George Sand, amour que l’ambitieuse comtesse, habituée à primer et à triompher sur tous, ne pouvait pardonner. À cette occasion il devint de toute évidence que pendant tout le temps de cette prétendue amitié il n’y avait que George Sand qui s’y fût sincèrement livrée, que Mme d’Agoult avait toujours joué jeu double, tant avec George Sand qu’avec elle-même ; elle agissait en catimini, au lieu de s’exprimer franchement, elle avait toujours quelque chose de caché in petto. L’ambition, l’envie, la jalousie par rapport à « la gloire de Miltiade » couvaient dans son cœur, en même temps qu’elle écrivait à son amie de tendres lettres, ou lorsqu’elle vivait côte à côte avec elle à Genève, à Nohant ou à Paris. Nous devons avouer que quant à George Sand nous n’attribuons aucune importance à cette amitié, bien plus belle et plus tendre sur le papier que dans les entrevues que les deux femmes eurent ensemble. Si sa soi-disant