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Lorsque George Sand, au printemps de 1835, arriva à Paris pour rejoindre Michel de Bourges, elle y retrouva Liszt, avec qui elle avait rompu si brusquement au mois de janvier de la même année, pour calmer la jalousie d’Alfred de Musset. George Sand avait alors écrit franchement à Liszt, qu’à son grand regret, ils ne devaient plus se voir, qu’il devait même ignorer où elle allait pour que « quelqu’un » ne s’agitât pas à propos de leur amitié qui venait de naître[1]. Liszt apprit avec beaucoup d’indulgence cette bizarre exigence de Musset. Il fit du reste preuve de beaucoup de bonhomie durant toute cette histoire. Voici par exemple une lettre inédite de Liszt à George Sand, écrite au moment où celle-ci se débattait encore dans les affres de sa passion, et certainement avant la lettre du 19 janvier 1835, mentionnée plus haut[2] :

« Je crains bien, Madame, que ce mieux dont vous tirez presque vanité, ne soit de bien courte durée ; peut-être même n’est-ce qu’une réaction organique contre des souffrances intolérables ; si je n’avais été arrêté en chemin par l’idée de vous déranger ou de vous incommoder mal à propos, vous auriez eu l’ennui de m’entendre préluder plus d’une fois sur votre piano. Me serait-il permis d’espérer qu’à votre retour vous voudrez bien encore me compter au nombre des cinq ou six personnes que vous recevez assez volontiers les jours de pluie ?… Il m’aurait été bien agréable de n’être pas refusé par vous dimanche, mais je n’en garde que le chagrin sans aucune rancune ; d’ailleurs, c’est une occasion qui se reproduira une autre fois et mieux.

  1. Cette lettre de George Sand, se trouve dans le livre de La Mara : Briefe hervorragender Zeitgenossen au Franz Liszt, et est datée, d’après elle, du 19 janvier 1835.
  2. Toutes les lettres de Liszt que nous donnons dans les chapitres X, XI, et XII sont inédites.