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garder des séductions du luxe et même de celles de l’amour, et sauva par là, la candide et faible Aldini prête à tout lui sacrifier. Devenu chanteur d’opéra et célèbre, Lélio fait connaissance avec la fille d’Aldini, cette petite Alezia, qu’il avait autrefois bercée, et qui est à présent une beauté altière se jouant de ses adorateurs comme un chat avec les souris. C’est ce qu’elle essaie de faire avec Lélio, mais elle tombe elle-même passionnément amoureuse de lui. Pourtant, lorsqu’elle découvre que Lélio n’est autre que le petit chanteur que sa mère avait jadis aimé, et qui l’avait noblement fuie, soucieux de son bonheur et de sa tranquillité à elle, autant que de son art et de sa liberté à lui, Alezia renonce à son amour, épouse son cousin, et Lélio retourne à sa vie errante et libre et à son art adoré. Ce qu’il y a de mieux réussi dans ce roman, c’est le caractère de la jeune fille. Ce mélange de coquetterie et de fierté, de petites ruses et de grande droiture, de douceur féminine et de hardiesse, font de la jeune Aldini un des types de femme les plus sympathiques et les plus attachants de George Sand.

Mattea est un charmant et gai tableau de genre de la vie vénitienne. George Sand a essayé d’y peindre les types variés de la population cosmopolite de Venise, que l’écrivain observait en fumant sa cigarette sur la place Saint-Marc, en compagnie de Musset ou de Pagello ou en parcourant, avec lui et avec ses amis, les îles de l’archipel vénitien. C’est écrit avec beaucoup d’humour et de finesse, et même, malgré son coloris romantique, c’est tout à fait réaliste, surtout dans la peinture du caractère et de la vie de Mattea elle-même, qui sont dessinés d’après nature, — une nature très connue de l’auteur. Voici par exemple le portrait de Mattea : « Elle était douée d’une imagination