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imaginons qu’il est pour nous deux identiquement diaphane, qu’il est pour nous deux aussi également doux ou sec, que les mots employés répondent adéquatement à la sensation que chacun de nous a perçue, et que ces sensations se sont réfléchies, les mêmes et à un même degré dans l’intelligence. Et nous croyons que nous nous comprenons les uns les autres ! Cependant ce n’est là que nous décevoir en paroles, — cette pitoyable monnaie étrangère (comme l’a fait remarquer depuis longtemps un homme d’esprit), qui ne peut jamais répondre complètement à la vraie valeur de notre monnaie, l’idée à nous, mais tout au plus la rendre très approximativement. Mais si un phénomène matériel extérieur, aussi insignifiant que l’aspect d’un verre et le goût du vin qu’il renferme, se reflète tout différemment sur deux esprits divers, produit des impressions, des sensations et des nuances d’idées différentes, se diversifie généralement en deux âmes humaines, combien cette diversité se montre-t-elle plus profonde encore, plus tranchante, combien cette faible dissemblance d’impressions entraîne-t-elle une plus grande divergence dans la tournure même de la pensée, lorsque le phénomène, au lieu de se passer dans le monde extérieur, se produit dans notre vie intérieure, psychique. Ce qui m’exaspère, vous laisse parfaitement froid ; ce que j’appelle amour n’est pas du tout pour vous de l’amour, mais simplement de l’amitié ; même ce que nous sommes

    gers, — MM. de Spoelberch, Maurice Clouard, Cabanès, Rocheblave, Mariéton et autres. Mais les lecteurs russes ne nous firent pas l’honneur de remarquer la primeur de certains faits et de ce que nous avions fait notre possible pour détruire la légende, bien avant que M. Rocheblave aussi se soit servi de ce mot. En reproduisant ici ces deux chapitres, nous omettons seulement ce qui a déjà été dit dans les chapitres précédents et nous signalons dans les notes au bas des pages les sources, alors inédites, maintenant publiées. Le lecteur verra que l’opinion que nous avions déjà exprimée, en 1895, au sujet de cet épisode, est devenue vérité admise par tout le monde.