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cor et à cri que le progrès s’était arrêté inutile et stérile, que rien n’avait été obtenu par le changement politique des vainqueurs, qu’il fallait continuer, que la régénération de l’humanité devait être radicale, complète. »

« Il ne manqua certes pas de se produire, à côté de ces cris, beaucoup de conclusions malsaines et même monstrueuses ; l’essentiel, c’était que l’on voyait luire une espérance nouvelle et que la foi renaissait dans les âmes. Personne n’ignore l’histoire de cette évolution qui dure encore aujourd’hui et qui n’a pas l’air de devoir s’arrêter. Il n’entre nullement dans mon intention de la juger ici ; mon seul désir était d’indiquer la vraie place qui en revient à George Sand. C’est elle qui est à la tête de cette évolution. Tout en l’accueillant avec faveur, on disait alors d’elle, en Europe, qu’elle prêchait l’émancipation de la femme, jouant le rôle de prophète en ce qui concernait les droits de la « femme libre » (expression de Senkowsky), mais cela n’est pas tout à fait exact, parce qu’elle ne s’occupait pas de féminisme et ne visait pas à rendre la femme libre. George Sand prenait part à l’évolution tout entière, mais non à la seule propagande des droits de la femme… »

Après avoir fait remarquer, qu’en qualité de femme, elle préférait sans doute peindre des héroïnes plutôt que des héros, et que sa manière d’agir aurait dû lui attirer la sympathie des femmes du monde entier, comme sa mort leur inspirer un chagrin particulier, Dostoïewsky déclare voir en elle « l’une des plus sublimes et des plus belles représentantes de la femme, une femme presque unique par la vigueur de son esprit et de son talent, un nom devenu désormais historique, un nom destiné à ne jamais tomber dans l’oubli, à ne pas disparaître dans l’histoire de l’humanité