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dit qu’eux, les enfants, « ont grandi sous l’influence d’hommes élevés en partie par George Sand. » Et c’est pour nous un devoir de répéter la même chose, quoique la génération à laquelle nous appartenons, soit déjà celle des petits enfants.

On ne sera donc pas étonné de nous voir, en qualité de petit-fils spirituel du grand écrivain, tenter sur George Sand un ouvrage biographique et critique. Mais cette raison seule ne suffirait pas pour nous donner le droit d’oser entreprendre un travail aussi immense après tant d’auteurs brillants et célèbres, après tant d’ouvrages signés de noms consacrés et connus ! Il y a beaucoup trop d’autres raisons convaincantes pour que nous ne regardions pas comme notre devoir d’écrivain russe, de consacrer nos forces à écrire sur George Sand un ouvrage qui contienne sa biographie complète — il n’en existe pas encore — et à donner une appréciation aussi détaillée que possible de son talent d’artiste et de penseur.

La première de ces raisons est l’influence qu’exerça l’illustre romancière sur les grands écrivains russes, ses contemporains, influence que nous avons déjà mentionnée plus haut, avec les effets qu’elle a produits. On prétend que la lecture des œuvres de George Sand a joué un rôle important parmi les influences qui ont fait, plus tard, rougir Bélinsky[1]

  1. Vissarion Bélinsky, célèbre critique russe des années 30 à 40. Les historiens de la littérature distinguent généralement trois périodes dans son activité littéraire. Au début, on le trouve sous l’influence des idées de Schelling et sa critique est exclusivement esthétique. Vint ensuite la période de son entraînement vers les théories de Hegel ; à cette époque, le critique s’élevait avec force contre toute œuvre française et contre Schiller qu’il déclarait poète à tendance, et non objectif. (Voir là-dessus l’ouvrage d’A. Pypine : Bélinsky, sa vie et sa correspondance et les Mémoires de Panaïef). Enfin, Bélinsky passa dans les rangs de la critique publiciste qui analyse les œuvres littéraires au point de vue des intérêts sociaux.