Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T1.djvu/468

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui restera toujours et qui fera la gloire de son auteur[1]. Tout en s’émerveillant et en s’inclinant devant la désolante profondeur du scepticisme de Lélia, Sainte-Beuve tâchait en même temps de consoler, de calmer la malheureuse romancière, de la diriger dans la voie salutaire de la compréhension de toutes les lois de la vie, de lui faire prendre la résolution de cultiver la partie la plus artistique de son génie et de cette manière d’amener George Sand à chercher le remède de tous ses chagrins dans l’amour de l’art et du travail. Le furibond Planche attirait George Sand par la force de son pessimisme irréconciliable et logique. Elle retrouvait en lui des traits de sa propre nature et en même temps elle craignait les discussions de Planche comme dangereuses pour son âme en détresse. Cependant elle fut plus liée avec lui qu’avec Sainte-Beuve. Leurs relations étaient des plus cordiales. En 1832, Le jeune Maurice étant entré au Lycée Henri IV, Planche allait parfois l’y chercher pour le promener ou lui faire passer un jour de congé chez lui. Il rendit en outre à George Sand des services plus sérieux. On sait que, comme Sainte-Beuve, il s’était extasié dans ses articles, sur les romans de la jeune femme, surtout sur Lélia, contribuant ainsi à répandre la gloire de son amie[2].

  1. Sans entrer dans Les détails, nous dirons seulement que par les lettres de George Sand à Sainte-Beuve, publiées dans : 1o Les Portraits contemporains, 2o dans le volume de Lévy ; et 3o dans le livre de M. de Spoelberch, et par une lettre de Sainte-Beuve à George Sand, publiée ibidem, on voit que Lélia faisait le sujet continuel de leurs conversations. Toutes les lettres inédites témoignent du même fait.
  2. Voici ce que Sainte-Beuve écrivait le 18 mai 1833 dans ses Portraits contemporains (t. I. p. 128), avant même que Lélia fût livrée à la publicité. Après avoir dit qu’Obermann et son malheureux auteur n’avaient joui d’aucune gloire, n’eurent à essuyer aucune injustice trop grande, mais avaient longtemps souffert d’une indifférence opiniâtre, tacite et pénible, tout en ayant exercé sur les élus et les raffinés, une influence secrète, lente, maladive, et après avoir cité comme exemples les noms de Rabbe, de Nodier, de de Latoucbe, de Ballanche, il ajoute :