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avec les vertus austères de la médiocrité, mais il ne faut pas que la médiocrité touche à la détresse : c’est là une situation que ni l’homme, ni la femme, ni la vieillesse, ni la jeunesse, ni même l’âge mûr ne peuvent regarder comme le développement normal de la destinée providentielle ».

Selon nous, cependant, les lignes qui terminent ce livre expriment d’une manière bien plus juste, quoiqu’un peu nuageuse, l’idée-mère du roman. Elles peuvent être commentées ainsi : Ne vous fiez pas trop à ces vertus passives qui ne sont souvent vertus que parce qu’elles n’ont pas la force d’être quelque chose de plus actif. La vertu, le sacrifice de soi-même, l’humilité chrétienne, ne sont durables et bonnes, que lorsqu’elles sont d’un côté purement instinctives et émanent d’une âme pure et belle, et d’un autre sont conscientes et viennent d’un esprit éclairé et bienfaisant. Là où il n’y a que le désir de paraître élevé, bon, pur, où la vertu chrétienne et l’abnégation ne sont pas pénétrées d’un vrai amour, cette vertu est froide, conduit souvent à la sécheresse, à l’envie, à la méchanceté, à l’orgueil, à l’égoïsme, à tout ce que vous voudrez, mais non aux actes et aux sentiments chrétiens. De pareille vertu, on peut s’attendre à l’occasion, à toutes les méchancetés et même au crime. Placez-la dans des conditions où l’on n’exige ni humilité, ni patience, ni amour, mais des qualités tout opposées, et elle sera capable de tout. On bien on peut tirer de Pauline la conclusion que voici : Des natures non artistiques ne seront jamais de grandes âmes, elles sont trop sèches dans leur morale journalière, trop confinées dans leur mesquine et égoïste individualité.

Le roman, la première partie surtout, renferme bon nombre de pages très belles et d’observations heureuses, et