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de Stahl ; au scepticisme brillant et froidement indulgent de la Philosophie de la vie conjugale, de Balzac[1] ; à la gracieuse Mimi Pinson, de Musset, et à tout le reste de l’ouvrage. Il se peut aussi qu’en plaçant le Coup d’œil général sur Paris en tête du recueil, Stahl l’ait fait pour obéir à la formule « place aux dames ». Toute courtoisie à part, la place d’honneur n’en revient pas moins à cet article en raison de sa valeur intrinsèque. Par le sérieux et le ton qui y règnent, il se distingue bellement du genre gai et spirituel des autres écrivains, que Stahl a même jugé nécessaire de le relier par une espèce de « passage aux affaires courantes », aux articles insoucieusement enjoués et inoffensifs, parfois même incisifs ou mordants, comme le sont les études de Balzac. En lisant cet article, on se rappelle involontairement le mot de Heine sur George Sand : Sie ist überhaupt eine der unwitzigsten Französinnen, die ich kenne = « Elle est en général une des Françaises les moins spirituelles que je connaisse[2]. » Cette « Unwitzigkeit », cette absence d’esprit, est ici tout à son honneur. George Sand ne songeait guère à faire de l’esprit. Les problèmes les plus graves du siècle et de l’humanité se présentaient à elle en ce moment, et c’est pour elle une gloire et un honneur de ne les avoir jamais perdus de vue. Elle ne pouvait répondre par un refus aux instances de Stahl qui lui demandait de collaborer à son ouvrage. « Tu m’as fait promettre, honnête Flammèche, de te dire mon mot sur Paris ; et comme un diable candide et bénin que tu es, tu as insisté au point

  1. L’ouvrage est plus connu sous le nom de : Les petites misères de la vie conjugale. Il ne faut pas le confondre avec la Physiologie du mariage.
  2. Französische Zustände. Lutetia, p. 300, vol. XI. H. Heine’s Sämmtliche Werke. Hamburg, 1874. Hoffmann und Campe.