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plaisanterie si cela ne lui plaisait pas : qu’elle n’avait pour cela qu’à en dire quelques mots à Casimir. Aurore n’en voulut rien faire et tout demeura comme par le passé.

Casimir partit et revint. À son retour, il se montra plus sérieux et, avec beaucoup de sincérité et de simplicité, fit une proposition à Aurore elle-même, sans se conformer à l’usage ; car, disait-il, il désirait obtenir son consentement avant de s’adresser à sa mère. « Il ne me parlait point d’amour et s’avouait peu disposé à la passion subite, à l’enthousiasme, et, dans tous les cas, inhabile à l’exprimer d’une manière séduisante. Il parlait d’une amitié à toute épreuve et comparait le tranquille bonheur domestique de nos hôtes à celui qu’il croyait pouvoir jurer de me procurer. « Pour vous prouver que je suis sûr de moi, disait-il, je veux vous avouer que j’ai été frappé à la première vue de votre air bon et raisonnable. Je ne vous ai trouvée ni belle, ni jolie ; je ne savais pas qui vous étiez, je n’avais jamais entendu parler de vous ; et cependant, lorsque j’ai dit en riant à Mme  Angèle que vous seriez ma femme, j’ai senti tout à coup en moi la pensée que si une telle chose arrivait, j’en serais bien heureux. Cette idée vague m’est revenue tous les jours plus nette, et quand je me suis mis à rire et à jouer avec vous, il m’a semblé que je vous connaissais depuis longtemps et que nous étions de vieux amis[1]. »

Tout cela plut beaucoup à Aurore. Casimir lui agréait comme bon compagnon et jeune homme gai. Par les Duplessis elle avait entendu dire beaucoup de bien de lui et de toute sa famille. Elle fut même ravie qu’il n’eût

  1. Histoire, vol. III. p. 423.