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que les autres, et tellement stupides, qu’Aurore n’aurait jamais pu s’imaginer de pareilles choses si elle ne les avait pas vues plus tard, noir sur blanc, dans une des lettres envoyées à sa mère. On racontait qu’elle déterrait les cadavres, entrait à cheval dans l’église, lirait du pistolet sur l’hostie, que ses chiens dévoraient des petits enfants, et, pour couronner l’œuvre, on débitait que Stéphane était son amant. Les calomnies parvinrent aux oreilles du curé de La Châtre, le confesseur d’Aurore, qui se permit un jour, la confession finie, de lui en parler d’une manière fort peu délicate. Indignée jusqu’au fond de l’âme, Aurore se leva, et, ayant hardiment déclaré au prêtre combien elle était révoltée par la grossière inconvenance de son interrogatoire, quitta le confessionnal pour n’y plus jamais revenir.

Lorsque Stéphane fut parti pour Paris, afin d’y continuer ses études de médecine, une correspondance suivie s’engagea entre les deux jeunes gens, au su de Deschartres. Les lettres de Stéphane avaient un ton sérieux et quelque peu pédantesque qui ne déplaisait point à Aurore. Malheureusement, il tomba réellement amoureux de son élève, ce que George Sand nous raconte d’une manière assez transparente, bien qu’avec des réticences et tout en ayant l’air de dire le contraire. Stéphane Ajasson fut, disons-le dès à présent, le premier de la nombreuse série des hommes qui furent épris de George Sand. Laissant de côté ceux envers qui elle ne fut pas indifférente, remarquons qu’Aurore Dupin, comme plus tard Aurore Dudevant, eut, dans le sens propre du mot, un « succès » presque incroyable ; le nombre de ses adorateurs fut légion. Sa Correspondance et son premier ouvrage : Voyage en Auvergne, nous montrent que toutes ses apparitions dans