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oublia comme par enchantement ses chagrins et son noviciat manqué et s’adonna tout entière à la joie de se sentir libre. Elle passa tout son temps dans les champs et les prairies ; il lui tardait de revoir ses amies villageoises et tous les sites jadis préférés. Puis, arrivèrent son amie du couvent, Pauline de Pontcarré avec sa mère, et le chevalier de Lacoux, qui apprit à Aurore à jouer de la harpe, puis M. de Trémoville, qui arrangea, pour distraire la vieille Mme  Dupin, un spectacle où la jeune fille joua de nouveau un rôle d’homme, celui du « berger Colin ». L’été s’écoula dans ces divertissements. Aurore s’était d’abord composé un programme de ses occupations, car elle avait l’intention de continuer à étudier la musique, le dessin, l’histoire, l’anglais et l’italien, mais ce projet dut être remis à plus tard.

Hippolyte arriva ensuite en congé. C’était alors un bel et brave officier. L’idée lui vint d’enseigner l’équitation à sa sœur, et en très peu de temps Aurore apprit non seulement à monter les chevaux les plus fougueux, mais devint encore une écuyère intrépide. Ce sport, auquel elle s’adonna passionnément pendant de longues années, joua, comme nous le verrons, un grand rôle dans la vie de George Sand[1].

L’automne arriva. Hippolyte parti, Aurore passa l’hiver et toute l’année suivante en compagnie de Deschartres et de sa grand’mère, dont la santé s’affaiblissait de jour en jour. La vieille dame, qui avait toujours strictement observé le code de la correction mondaine, faisait encore de la toilette les jours où elle avait des invités chez elle,

  1. « Cet exercice physique, dit-elle, devait influer beaucoup sur mon caractère et mes habitudes d’esprit. » (Histoire de ma Vie, vol. III, p. 264.)