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trisaïeul et la trisaïeule, natures foncièrement sensuelles » ; « le bisaïeul, forte personnalité et esprit utopique » ; « la bisaïeule, artiste » ; « la grand’mère, lettrée et esprit fort » ; « le père, nature passionnée et artistique, talent musical et littéraire » ; « la mère, nature primitive, tempérament déséquilibré, exaltation et prépondérance de l’imagination » ; etc. Le lecteur, nous l’espérons, trouvera néanmoins fondée la conclusion suivante que nous déduirons de tout ce que nous avons dit jusqu’ici :

George Sand, cœur ardent, plein de pitié et de l’altruisme le plus profond ; esprit froid, enclin à tout systématiser, à tout généraliser, mais incapable d’opposer la moindre résistance à une utopie ou à la violence d’une passion ; tempérament passionné ; nature artiste dans le sens le plus large du mot ; imagination exaltée ; talent littéraire de première source et de première force.

Telle fut, en réalité, George Sand. Dès son plus jeune âge, ce fut une nature exceptionnelle, douée de rares qualités intellectuelles, mais portant en elle de funestes traits héréditaires. Son éducation, si elle en eut vraiment une ! — l’atmosphère sociale au milieu de laquelle s’écoulèrent ses premières années (les premières de l’Empire), — la vie nomade, les brusques changements dans le genre et les conditions de l’existence, ce passage perpétuel d’un milieu à un autre : du terne et bourgeois petit monde maternel dans le monde des grandeurs déchues, mais élégant et raffiné de l’aïeule, ou bien dans le brillant et bruyant milieu des guerriers napoléoniens — auquel appartenait son père, — tout cela rendit cette nature hors ligne plus individuellement exceptionnelle encore, et fit prendre à ses dons naturels une extension et une voie non moins extraordinaires.