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après sa mort, de mettre ses affaires en ordre, elle s’aperçut que la moitié de sa fortune était dissipée. Après avoir acquitté toutes les dettes de feu son mari, Mme  Dupin de Francueil put, avec le restant de sa fortune, acheter au sieur Piaron de Serennes son domaine — Nohant — qu’il avait acquis dans Le Berry au moment de la vente des biens nationaux. Elle s’y installa en 1795, et consacra toute sa vie à l’éducation de son fils adoré. Elle lui donna pour précepteur un certain Deschartres, un abbé qui, après la révolution, jeta sa soutane, s’adonna à l’étude des sciences naturelles et de la médecine, devint assez bon chirurgien, et fut, dans la suite, l’instituteur de George Sand elle-même. Il se montra toujours tout dévoué à Mme  Dupin, à son fils, et plus tard à sa petit-fille ; nous aurons encore maintes fois l’occasion de parler de lui.

Le jeune Maurice Dupin grandit dans la même sphère intellectuelle que sa mère. Il aimait à s’occuper d’art ; il jouait fort bien du violon, avant pour la musique de grandes dispositions qu’il avait probablement héritées d’elle, ainsi que de son père et de sa grand’mère, et il aimait passionnément le théâtre. Sa mère L’adorait et il le lui rendait bien. La tempête de la Révolution qui éclata avec la même violence sur les bons et sur les méchants, sur les ennemis des doctrines libérales comme sur ses adeptes (Mme  Dupin en était une ; elle partageait sérieusement les idées de Voltaire et de Rousseau et ne se contentait pas, comme la plupart des gens de son monde, de copier les petits pamphlets contre Marie-Antoinette ou de débiter des méchancetés contre la famille royale), cette tempête, disons-nous, faillit perdre les Dupin. Ils eurent à supporter des perquisitions, des « descentes à domicile », des arrestations et des incarcérations ; tout ce qu’ils blâmaient, eux et les