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marraine d’Aurore Dupin, interprétant naïvement les auspices qui accompagnaient la venue au monde de sa filleule — la couleur rose de la robe de sa mère et les sons de la musique de son père — prédit à l’enfant une vie de bonheur. Mais au-dessus de la simple corbeille d’osier qui servit de berceau à l’enfant flottaient aussi, invisible et puissantes, des forces mystérieuses, et bien que l’avenir de la petite Aurore fût entouré de plus de bons présages que de mauvais, ce n’est pas par pur caprice de sorcière que la future George Sand était prédestinée à subir de grandes tempêtes, à connaître beaucoup de revers et de malheurs.


Aurore Dupin apportait avec elle en ce monde les qualités et les défauts les plus divers, des traits de génie et des vices héréditaires qui, soit développés et fortifiés d’une génération à l’autre, soit modifiés et affaiblis sous l’influence d’éléments étrangers, atteignirent en elle leur plus haute expression. En prêchant, non sans arrière-pensée, et, nous le présumons, pro domo sua (et cela bien avant Émile Zola), la théorie de l’hérédité, George Sand démontre, à l’évidence, que chacun de nous est comme le produit de toute une série de générations, d’où il ressort que tous nos vices et nos vertus, toutes nos actions bonnes ou mauvaises, sont comme prédestinées et dépendent bien moins de notre volonté personnelle ou de notre éducation que des traits héréditaires de notre nature physique et morale. Le tome premier tout entier et une partie du tome II des Mémoires de George Sand sont consacrés à l’histoire de son bisaïeul et de sa bisaïeule, de son grand-père et de sa grand’mère, de son père, de sa mère et de ses autres parents, ainsi qu’à la correspondance entre la grand’mère et le père de notre héroïne. Des lecteurs naïfs se sont plaints de ces