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avait attiré le Khan aux portes de Moscou, afin de faire une sorte de diversion à la douleur profonde qu’avait éprouvée la Russie, depuis le cruel assassinat de Dmitri. Le peuple seul, écoutait et répétait cette calomnie. Godounoff, s’il avait été généreux et innocent, aurait dû mépriser cette ridicule accusation, qui se serait dissipée d’elle-même, mais comme il n’avait pas la conscience pure, il s’enflamma de colère à ces récits. Il expédia des officiers dans différens endroits, et leur ordonna d’interroger et de torturer des malheureux qui, dans leur simplicité, servaient d’échos à la calomnie et qui, au milieu de la terreur et des tourmens, accusaient des innocens. Plusieurs périrent dans les tortures ou en prison ; d’autres furent exécutés ; quelques-uns eurent la langue coupée, et beaucoup de lieux peuplés, (d’après ce que dit l’Annaliste), devinrent déserts en Ukraine ; nouvelles ruines ajoutées à celles d’Ouglitche.

Cette cruauté, digne du temps d’Ivan, parut indispensable à Godounoff pour sa sécurité et son honneur. Il voulait que personne n’osât ni parler, ni rien penser contre lui ; ce n’était