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1570. princes et de sa légion, marchant dans le plus grand ordre, suivie des condamnés, au nombre de plus de trois cents, semblables à des spectres, meurtris, déchirés, ensanglantés, pouvant à peine se traîner. Arrivé au pied des gibets, Jean promène ses regards autour de lui : étonné de n’apercevoir aucuns spectateurs, il ordonne aux légionnaires de rassembler les habitans et de les amener sur la place. Impatienté de leur lenteur, il court lui-même sur leurs pas, appelant les Moscovites au spectacle qu’il leur avait préparé, leur promettant grâce et sûreté. Les citoyens n’osèrent point désobéir : ils sortent des caves, des souterrains où ils s’étaient cachés et se rendent, tremblans de frayeur, sur la place des exécutions, qu’ils remplissent en peu d’instans ; les murailles, les toits étaient couverts de spectateurs : alors élevant la voix, le tzar leur dit : Peuple de Moscou, vous allez voir des tortures et des supplices ; mais je punis des traîtres. Répondez-moi ! mon jugement vous paraît-il juste ? À ces mots de bruyantes acclamations partent de tous côtés : Vive le tzar, notre seigneur et maître ! périssent ses ennemis ! Jean fit retirer de la foule des condamnés cent quatre-vingt personnes auxquelles il accorda la vie, comme aux moins coupables ; ensuite le secré-