Page:Kant - Critique de la raison pure, I.djvu/94

Cette page a été validée par deux contributeurs.
94
ESTHÉTIQUE TRANSCENDENTALE


problématique) ; l’autre, où l’on a égard à la forme de l’intuition de cet objet, laquelle doit être cherchée dans le sujet auquel l’objet apparaît, non dans l’objet lui-même, mais n’en appartient pas moins réellement et nécessairement au phénomène qui manifeste cet objet[ndt 1].

Le temps et l’espace sont donc deux sources où peuvent être puisées à priori diverses connaissances synthétiques, comme les mathématiques pures en donnent un exemple éclatant relativement à la connaissance de l’espace et de ses rapports. C’est qu’ils sont tous deux ensemble des formes pures de toute intuition sensible, et rendent ainsi possibles certaines propositions synthétiques à priori. Mais ces sources de connaissances à priori se déterminent leurs limites par là même (par cela seul qu’elles ne sont que des conditions de la sensibilité), c’est-à-dire qu’elles ne se rapportent aux objets qu’autant qu’ils sont considérés comme phénomènes et non comme des choses en soi. Les phénomènes forment le seul champ où elles aient de la valeur ; en dehors de là, il n’y a aucun usage objectif à en faire. Cette espèce de réalité que j’attribue à l’espace et au temps laisse d’ailleurs intacte la certitude de la connaissance expérimentale ; car cette connaissance reste toujours également certaine, que ces formes soient nécessairement inhérentes aux choses mêmes ou seulement à notre intuition des choses. Au contraire, ceux qui soutiennent la réalité absolue de l’espace et du temps, qu’ils les regardent comme des substances ou comme des qualités, ceux-là se mettent en contradiction avec les principes de l’expérience. En effet, s’ils se décident pour le premier parti (comme le

  1. Der Erscheinung dieses Gegenstandes.