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introduit dans le concept de la chose un certain mélange de représentations accessoires que l’entendement sait en écarter. En un mot, ce philosophe intellectualise les phénomènes[ndt 1], de même que Locke, avec son système de noogonie (s’il m’est permis de me servir de cette expression), sensualise[ndt 2] tous les concepts de l’entendement, c’est-à-dire les donne comme étant simplement des concepts de réflexion empiriques, mais abstraits. Au lieu de chercher dans l’entendement et dans la sensibilité deux sources de représentations tout à fait distinctes, mais qui ont besoin d’être unies pour juger des choses d’une manière qui ait quelque valeur objective, chacun de ces deux grands hommes s’attacha uniquement à l’une de ces deux sources, à celle qui, dans son opinion, se rapportait immédiatement aux choses mêmes, tandis que l’autre ne faisait que confondre ou ordonner les représentations de la première.

Leibnitz comparait donc entre eux uniquement au point de vue de l’entendement les objets des sens considérés comme choses en général. 1o En tant qu’ils doivent être jugés par cette faculté identiques ou différents. Comme il n’avait devant les yeux que les concepts de ces objets et non leur place dans l’intuition, dans laquelle seule les objets peuvent être donnés, et qu’il en laissait tout à fait de côté le lieu transcendental (c’est-à-dire la question de savoir si l’objet doit être rangé parmi les phénomènes ou parmi les choses en soi), il ne pouvait manquer d’étendre aux objets des sens (mundus phænomenon) son principe des indiscernables, qui n’a de valeur que pour les concepts des choses en général, et

  1. Intellectuirte die Erscheinungen.
  2. Sensificirt.