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sa détermination (l’un et l’autre dans le sens transcendental, puisqu’on fait abstraction de toute diversité de ce qui est donné et de la manière dont il est déterminé). Les logiciens appelaient autrefois matière le général, et forme, la différence spécifique. Dans tout jugement on peut appeler matière logique (du jugement) les concepts donnés, et forme du jugement, le rapport de ces concepts (unis par la copule). Dans tout être les éléments constitutifs[ndt 1] (essentialia) en sont la matière ; la manière dont ces éléments sont unis en une chose en sont la forme essentielle. En outre, par rapport aux choses en général, la réalité illimitée était regardée comme la matière de toute possibilité, et sa limitation (sa négation) comme la forme par laquelle une chose se distingue d’une autre suivant des concepts transcendentaux. L’entendement en effet exige d’abord que quelque chose soit donné (du moins dans le concept), pour pouvoir le déterminer d’une certaine manière. La matière précède donc la forme dans le concept de l’entendement pur, et c’est pourquoi Leibnitz admettait d’abord des choses (des monades), et ensuite une faculté représentative inhérente à ces choses sur laquelle il pût fonder leurs rapports extérieurs et le commerce de leurs états (c’est-à-dire de leurs représentations). L’espace et le temps étaient donc possibles, le premier uniquement par le rapport des substances, et le dernier par l’enchaînement de leurs déterminations entre elles, en tant que principes et conséquences. Il en devrait être ainsi en effet si l’entendement pur se rapportait immédiatement aux objets, et si l’espace et le temps étaient des déterminations des choses en soi. Mais s’ils

  1. Bestandstücke.