Page:Kant - Critique de la raison pure, I-Intro.djvu/123

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
cxii
ANALYSE DE LA CRITIQUE


raison, c’est-à-dire de l’enchaînement en un seul principe. L’unité rationnelle est l’unité du système, et cette unité systématique n’a pas pour la raison l’utilité objective d’un principe qui l’étendrait sur les objets, mais l’utilité subjective d’une maxime qui l’applique à toute connaissance empirique possible des objets. » Kant ajoute cependant, comme il l’a déjà fait plus haut, que le principe de cette unité systématique est aussi en un sens objectif, quoique d’une manière indéterminée, « non pas comme principe constitutif servant à déterminer quelque chose relativement à son objet direct, mais comme principe régulateur et comme maxime servant à favoriser et à affermir à l’infini (d’une manière indéterminée) l’usage empirique de la raison, en loi ouvrant de nouvelles voies que l’entendement ne connaît pas, sans jamais être en rien contraire aux lois de cet usage. » Mais, si les idées de la raison pure ne peuvent remplir leur destination qu’à la condition d’être en quelque sorte objectives : la raison ne peut en effet concevoir cette unité systématique sans donner à son idée un objet ; ce serait méconnaître le sens de cette idée que de la tenir pour l’affirmation ou même pour la supposition d’une chose réelle, à laquelle on voudrait attribuer le principe de la constitution systématique du monde. « On doit, au contraire, dit Kant (p. 261), laisser tout à fait indécise la question de savoir quelle est en soi la nature de ce principe qui se soustrait à nos concepts, et ne faire de l’idée que le point de vue duquel seul on peut étendre cette unité si essentielle à la raison et si salutaire à l’entendement. En un mot, cette chose transcendentale n’est que le schème de ce principe régulateur par lequel la raison, autant qu’il est en elle, étend à toute expérience l’unité systématique. »

Reprenant encore une fois les trois grandes idées de la raison pure, Kant montre les avantages que l’on peut tirer de chacune d’elles quand on se renferme dans les limites de son usage, et les illusions où l’on tombe quand on en sort. Ainsi l’idée psychologique, qui sert à ramener à l’unité d’un seul et même principe les divers phénomènes du sens intime, cette idée ne peut offrir que des avantages, si l’on se garde bien de la prendre pour quelque chose de plus qu’une simple idée. « Alors en effet, dit Kant (p. 263), on ne mêle plus en rien les lois empiriques des phénomènes corporels, lesquelles sont d’une