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DE LA DÉFAILLANCE


trouve pour ainsi dire paralysé momentanément dans l’usage de ses sens extérieurs.


§ XXVII.


De la défaillance et du sentiment de la mort.


La défaillance, qui succède ordinairement à un étourdissement (changement d’un grand nombre de sensations différentes qui reviennent successivement et avec une rapidité si grande qu’on ne peut les saisir), est un phénomène avant-coureur de la mort. L’obstacle à toutes les sensations en même temps est l’asphyxie ou mort apparente, qui, autant qu’on peut l’observer extérieurement, ne diffère de la mort véritable que par les conséquences (comme chez les noyés, les pendus, les suffoqués).

Nul ne peut expérimenter en soi-même le fait de mourir (car pour faire une expérience il faut vivre) ; ou ne peut donc l’observer que dans autrui. On ne peut juger si la mort est douloureuse par le râle ou les convulsions qui l’accompagnent ; ce n’est là vraisemblablement qu’une réaction purement mécanique de la force vitale ; peut-être y a-t-il une douce sensation à se sentir insensiblement affranchi de toute douleur. — La crainte de la mort, naturelle à tous les hommes, au plus malheureux ou au plus sage, n’est donc pas une appréhension de mourir ; c’est plutôt, comme le dit avec raison Montaigne, l’appréhension