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334 DES CARACTÈRES.

impuissante (par sa propre faute) de sa raison personnelle. Cette éducation, qui s'accomplit de haut en bas, est salutaire, mais dure et sévère, exposée à de nombreux contre-temps, et, dans le travail de la nature qui l'accomplit, allant presque à la ruine de l'espèce entière. Ce travail consiste dans la réalisation par Thomme non pas du bien qu'il ambitionne, mais d'un bien qui, lorsqu'une fois il existe, ne peut se conserver que par le mal qui est un principe de dissolution intérieure et constante. Par Providence il faut donc entendre cette sagesse qui nous étonne dans la conservation des espèces organisées, dans son action tout à la fois destructrice et protectrice des êtres physiques; mais il n'est pas pour cela nécessaire de reconnaître dans cette prévision un principe supérieur, comme nous le faisons habituellement quand il s'agit de la conservation des plantes et des animaux. — Du reste le genre humain peut et doit être lui-même auteur de sa félicité; mais on ne peut pas prouver ? priori, en partant des dispositions naturelles que nous lui connaissons, qu'il le sera; cette preuve n'est possible qu'en se fondant sur l'expérience et l'histoire ; c'est un espoir aussi fondé qu'il est nécessaire de ne pas douter du progrès de l'humanité, mais au contraire de travailler (chacun selon son pouvoir), en prenant pour guides la prudence et l'instruction morale, à l'avancement vers ce terme désiré. On peut donc dire que le premier caractère du genre humain est la faculté que nous possédons, comme êtres raisonnables, de nous donner person-