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se sert de l’infamie des autres (infamie qu’on ne peut plus ensuite extirper entièrement).

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Quoique les lois indiquées ne soient objectivement, c’est-à-dire dans l’intention des puissances, que des lois prohibitives[ndt 1] (leges prohibitivæ), il y en a cependant quelques-unes de strictes (leges strictæ), c’est-à-dire qui sont indépendantes de toutes les circonstances et qui veulent être observées sur-le-champ (telles sont celles des no I, V, VI), tandis que d’autres (comme celles des no II, III, IV), sans faire exception à la règle du droit, sont subjectivement larges (leges latæ), la faculté de les exécuter dépendant des circonstances, et souffrent quelque ajournement dans l’exécution, sans permettre toutefois qu’on perde de vue leur but et que l’on prolonge indéfiniment ce délai, par exemple que l’on ajourne indéfiniment (que l’on renvoie ad calendas græcas, comme avait coutume de dire Auguste) la restitution de leur liberté à certains États (conformément au no II). Par conséquent il n’est pas permis de ne pas faire cette restitution ; il est permis seulement de l’ajourner, de peur que, par trop de précipitation, on n’aille contre le but même qu’on se propose. La défense ne concerne ici que le mode d’acquisition à observer à l’avenir, et non pas l’état de possession, qui, sans avoir le titre de droit nécessaire, a été dans son temps (à l’époque de la prétendue acquisition), tenu pour légitime pour les autres États, suivant l’opinion publique d’alors[1].




  1. Verbotgesetze.


  1. Ce n’est pas sans fondement qu’on a jusqu’ici douté si, outre le commandement (leges præceptitæ) et la défense (leges prohibitivæ), il peut y avoir encore des lois permissives (leges permissivæ) de la raison pure. Car les lois en général contiennent le principe d’une nécessité pratique objective, tandis qu’une permission indique simplement la possibilité de faire certaines actions ; une loi permissive impliquerait donc la contrainte de faire une action à laquelle chacun peut n’être pas contraint, ce qui serait une contradiction, si l’objet de la loi avait le même sens sous les deux rapports. — Mais, dans la loi permissive dont il s’agit ici, la défense ne se rapporte qu’au futur mode d’acquisition d’un droit (par exemple par héritage), tandis que l’exemption de cette défense, c’est-à-dire la permission, regarde l’état de possession actuelle. Or, dans le passage de l’état de nature à l’état civil, cette possession, quoiqu’elle ne soit pas légitime, peut être maintenue comme loyale, en vertu d’une loi permissive du