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superflue et peut souvent égarer. En cela le critique se joint volontiers à l’auteur ; car la question ici est seulement de savoir à quelles conditions je puis exercer la contrainte sans contredire les principes universels du droit. Tant que l’on considère les choses au point de vue de l’état de nature, c’est l’affaire de l’autre de rechercher si, d’après les mêmes principes, il peut rester passif ou réagir ; car dans l’état civil il y a toujours pour la partie adverse une obligation correspondante à la sentence du juge, qui reconnaît le droit de l’autre partie. Cette remarque a aussi dans le droit naturel la plus grande utilité, pour empêcher qu’on n’embrouille le principe propre du droit en y mêlant des questions d’éthique. Mais que le droit de contrainte ait nécessairement pour fondement une obligation à la contrainte, qui nous soit imposée par la nature même, c’est ce qui ne parait pas clair au critique, surtout parce que le principe contient plus qu’il n’est nécessaire pour cette conséquence. Car il semble suivre de là qu’on ne peut même rien abandonner d’un droit au sujet duquel la contrainte est légitime, puisque la légitimité de cette contrainte repose sur une obligation intérieure, celle d’acquérir à tout prix, et par conséquent même à l’aide de la force, la perfection qu’on nous dispute. Il semble aussi que, d’après le criterium du droit ici adopté, la question de savoir ce sur quoi j’ai un droit soit si difficile à juger, jusque dans les cas les plus ordinaires de la vie, que même l’intelligence la plus exercée doive être dans un continuel embarras, sinon dans l’absolue impossibilité de décider avec certitude jusqu’où s’étend son droit. — L’auteur soutient que le droit à une réparation[1] ne se rencontre pas dans le pur état de nature comme droit de contrainte ; cependant il avoue qu’il ne l’abandonne que parce qu’il ne pense pas pouvoir le prouver. Dans le même état il n’admet non plus aucune responsabilité[2], parce qu’il ne s’y trouve pas de juge. — Il donne pour l’application quelques indications dans l’appendice, où il traite de la première acquisition, de celle qui a lieu par le moyen d’un contrat, du droit civil et du droit des gens, et enfin il propose une nouvelle science nécessaire, qui puisse remplir la lacune entre le droit naturel et le droit positif. On ne peut con

  1. Zum Ersatz
  2. Zurechnung