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entre toi et moi dans l’état de nature, ni entre nous comme États, constitués légalement à l’intérieur, mais affranchis de toute loi à l’extérieur (dans leurs rapports réciproques) ; — car ce n’est pas de cette façon que chacun doit chercher son droit. La question n’est donc plus de savoir si la paix perpétuelle est une chose réelle ou non[1] et si nous ne nous trompons pas dans notre jugement théorétique, quand nous supposons le premier cas ; mais nous devons agir comme si la chose, qui peut-être ne sera pas, était exécutable, et, en vue de ce but, établir la constitution (peut-être le républicanisme de tous les États ensemble et en particulier) qui nous semble la plus propre à y conduire et à mettre fin à ces guerres impies, vers lesquelles jusqu’ici tous les États, sans exception, ont dirigé leurs institutions intérieures, comme vers leur but suprême. Que si nous ne pouvons atteindre cette fin et si elle n’est toujours pour nous qu’un vœu pieux, du moins ne nous trompons-nous certainement pas en nous faisant une maxime d’y tendre sans relâche, car cela est un devoir. Quant à supposer que la loi morale est trompeuse, ce serait faire naître en soi le détestable désir d’être dépourvu de toute raison et de se voir, du côté de ses principes, confondu avec les autres classes d’animaux, sous le commun empire du mécanisme de la nature.

On peut dire que ce traité de paix universelle et perpétuelle ne constitue pas seulement une partie, mais tout le but final du Droit, considéré dans les limites de la seule raison. En effet, il n’y a d’état de paix

  1. Ein Ding oder Unding.