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CRITIQUE DE LA RAISON PRATIQUE.


forme à l’intention morale. Or un être, qui est capable d’agir d’après la représentation de certaines lois est une intelligence (un être raisonnable), et la causalité de cet être, en tant qu’elle est déterminée par cette représentation, est une volonté. Donc la cause suprême de la nature, comme condition du souverain bien, est un être qui est cause de la nature, en tant qu’intelligence et volonté (par conséquent, auteur de la nature), c’est-à-dire qu’elle est Dieu. Par conséquent, le postulat de la possibilité du souverain bien dérivé *[1] (du meilleur monde) est en même temps le postulat de la réalité d’un souverain bien primitif **[2], c’est-à-dire de l’existence de Dieu. Or, puisque c’est un devoir pour nous de travailler à la réalisation du souverain bien, ce n’est pas seulement un droit, mais une nécessité ou un besoin qui dérive de ce devoir, de supposer la possibilité de ce souverain bien, lequel, n’étant possible que sous la condition de l’existence de Dieu, lie inséparablement au devoir la supposition de cette existence, c’est-à-dire qu’il est moralement nécessaire d’admettre l’existence de Dieu.

Il faut bien remarquer ici que cette nécessité morale est subjective, c’est-à-dire qu’elle est un besoin, et non pas objective, c’est-à-dire qu’elle n’est pas un devoir ; car ce ne peut être un devoir d’admettre l’existence d’une chose (puisque cela ne concerne que l’usage théorique de la raison). Aussi bien ne faut-il pas entendre par là qu’il est nécessaire d’admettre

  1. * des höchsten abgeleiteten Guts.
  2. ** ein höchsten ursprünglichen Guts.