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CRITIQUE DE LA RAISON PRATIQUE.


temps et de l’espace, il n’y a plus qu’un véritable système, c’est le Spinozisme, lequel fait de l’espace et du temps des déterminations essentielles de l’être premier, mais aussi regarde les choses qui dépendent de cet être (et nous-mêmes, par conséquent), comme des accidents qui lui sont inhérents, et non comme des substances, puisque, si ces choses n’existent, comme effets de l’être premier, que dans le temps, qui serait la condition de leur existence en soi, leurs actions ne peuvent être que les actions de cet être agissant en quelque point de l’espace et du temps. Aussi le Spinozisme, malgré l’absurdité de son idée fondamentale, arrive-t-il à une conclusion plus conséquente qu’on ne le peut faire dans la théorie de la création, lorsque, considérant les êtres comme existant réellement dans le temps, on les regarde comme des effets d’une cause suprême, et qu’en même temps on ne les identifie pas à cette cause et à son action, mais qu’on les considère en eux-mêmes comme des substances.

Cette difficulté se résout avec évidence et brièveté de la manière suivante : si l’existence dans le temps n’est qu’un mode purement sensible de représentation, propre aux êtres pensants qui sont dans le monde, et si, par conséquent, elle n’est pas un mode de leur existence comme choses en soi, la création de ces êtres est une création de choses en soi, puisque le concept d’une création n’appartient pas au mode sensible de représentation de l’existence et à la causalité, et ne peut se rapporter qu’à des noumènes. Par conséquent, quand je dis des êtres du monde sensible qu’ils sont créés, je les considère