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DU CONCEPT D'UN OBJET DE LA R. PURE PRATIQUE.


de la raison peut soumettre, comme une loi pour le Jugement, non pas un schème de la sensibilité, mais une loi qui peut être appliquée in concreto à des objets des sens, et, par conséquent, considérée comme une loi de la nature, mais seulement quant à la forme, et cette loi, nous pouvons l’appeler en conséquence le type de la loi morale.

La règle du Jugement, en tant qu’il est soumis aux lois de la raison pure pratique, est celle-ci : demande toi si, en considérant l’action que tu as en vue comme devant arriver d’après une loi de la nature dont tu ferais toi-même partie, tu pourrais encore la regarder comme possible pour ta volonté. C’est dans le fait d’après cette règle que chacun Juge si les actions sont moralement bonnes ou mauvaises. Ainsi l’on dira : Eh quoi ! si chacun se permettait de tromper, lorsqu’il penserait y trouver son avantage, ou se croyait le droit d’attenter à sa vie, dès qu’il s’en trouverait entièrement dégoûté, ou voyait avec une parfaite indifférence les maux d’autrui, et si tu faisais partie d’un tel ordre de choses, y serais-tu avec l’assentiment de ta volonté ? A la vérité chacun sait bien que, s’il se permet secrètement quelque ruse, tout le monde n’agit pas pour cela de la même manière, ou que, s’il est, sans qu’on s’en aperçoive, insensible pour les autres, ce n’est pas une raison pour que tout le monde soit dans la même disposition à son égard ; aussi cette comparaison de la maxime de notre action avec une loi universelle de la nature n’est-elle pas non plus le principe déterminant de notre volonté. Mais cette loi n’en est pas moins un type qui nous


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