Page:Kant-Critique de la raison pratique, trad. Barni, 1848.djvu/151

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
142
CRITIQUE DE LA RAISON PRATIQUE.


cipes a priori de deux facultés de l’âme, de la faculté de connaître et de la faculté de désirer, et déterminé les conditions, l’étendue et les limites de leur usage, et nous aurions assuré par là les fondements d’une philosophie systématique ou d’une science à la fois théorique et pratique.

    exemple, il est illicite à un orateur, comme orateur, de forger de nouveaux mots ou de nouvelles constructions, mais cela est licite au poëte dans une certaine mesure ; or, ni dans l’un ni dans l’autre cas, il n’est question de devoir. En effet, si quelqu’un veut compromettre sa réputation d’orateur, personne ne peut l’en empêcher. Il ne s’agit ici que de la distinction des impératifs en principes de détermination problématiques, assertoriques et apodictiques. J’ai aussi, dans la note où je rapproche les idées morales que les diverses écoles philosophiques se sont faites de la perfection pratique, distingué l’idée de la sagesse de celle de la sainteté, quoique j’aie expliqué ces idées comme étant au fond et objectivement identiques. Mais je ne parle dans cet endroit que de cette sagesse que l’homme (le Stoïcien) s’arroge, et, par conséquent, je ne la considère que subjectivement, comme une propriété attribuée à l’homme. (Peut-être le mot vertu, dont les Stoïciens font aussi un grand cas, désignerait-il mieux le caractère distinctif de leur école.) Mais c’est surtout l’expression de postulat de la raison pure pratique qui recevrait une fausse interprétation, si on en confondait le sens avec celui qu’ont les postulats des mathématiques pures, lesquels impliquent une certitude apodictique. Ceux-ci postulent la possibilité d’une action dont on a d’abord reconnu l’objet possible a priori, théoriquement et avec une entière certitude. Celui-là postule la possibilité d’un objet même (de Dieu et de l’immortalité de l’âme) d’aprés des lois pratiques apodictiques, et, par conséquent, pour le besoin seulement de la raison pratique. C’est qu’ici en effet la certitude de la possibilité postulée n’est pas théorique, et, par conséquent, apodictique, c’est-à-dire, ce n’est pas une nécessité reconnue par rapport à l’objet, mais une supposition nécessaire par rapport au sujet, pour l’accomplissement de ses lois objectives mais pratiques ; par conséquent, ce n’est qu’une hypothèse nécessaire. Je n’ai pu trouver de meilleure expression pour désigner cette nécessité rationnelle subjective, mais pourtant vraie et absolue.