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CRITIQUE DE LA RAISON PRATIQUE.

quente[1] que montrait la critique spéculative en nous enjoignant de ne considérer les objets d’expérience, comme tels, et parmi eux notre propre sujet, que comme des phénomènes, et de leur donner pour fondement des choses en soi, et, par conséquent, de ne pas prendre tout objet supra-sensible pour une fiction, et le concept même du supra-sensible pour un concept vide. Voici en effet la raison pratique qui, par elle-même et sans avoir fait aucune convention avec la spéculative, attribue de la réalité à un objet supra-sensible de la catégorie de la causalité, c’est-à-dire à la liberté (mais seulement, il est vrai, au point de vue pratique), et de cette manière confirme par un fait ce qui jusque-là ne pouvait être que conçu. Or en même temps la critique de la raison pratique confirme entièrement cette assertion singulière, mais incontestable, de la critique spéculative, que le sujet pensant même n’est pour lui-même, dans l’intuition interne, qu’un phénomène, si bien qu’elle y conduirait nécessairement, quand même la première ne l’aurait pas déjà établie[2].

Je comprends aussi par là pourquoi les plus graves

  1. der consequenten Denkungsart.
  2. L’union de la causalité de la liberté avec celle du mécanisme de la nature, causalités dont la première est établie par la loi morale, la seconde par la loi de la nature, mais l’une et l’autre dans un seul et même sujet, dans l’homme, cette union est impossible, si on ne se le représente, relativement à la première, comme un être en soi, et, relativement à la seconde, comme un phénomène, d’un côté par la conscience pure, et de l’autre par la conscience empirique. Autrement la raison tomberait inévitablement en contradiction avec elle-même.