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VIE ET VOYAGES DE HIOUEN-THSANG.

n’ont jamais manqué d’accourir à mes leçons, afin de les approfondir et d’en recueillir tous les fruits. J’ai parlé, prêché, discuté devant eux. J’avouerai, en rougissant, que je suis le religieux le plus renommé de cette époque. Si je voulais faire encore des progrès dans la vertu et travailler à ma réputation, croyez-vous que je resterais au-dessous des religieux de Tun-hoang ? J’étais vivement affligé de voir que les livres sacrés étaient incomplets, et que leur interprétation offrait de fâcheuses lacunes. Oubliant alors le soin de ma vie et bravant les obstacles et les dangers, j’ai fait serment d’aller chercher dans l’occident la Loi que le Bouddha a léguée au monde. Mais vous, homme bienveillant, au lieu d’exciter mon zèle, vous m’exhortez à retourner sur mes pas ! Direz-vous que vous partagez mon dégoût pour les tribulations du monde, et que vous voulez fonder avec moi l’espoir du Nie-pan (du Nirvâṇa, ou de la délivrance finale) ? Si vous voulez absolument me retenir, je vous permets de m’ôter la vie. Hiouen-thsang ne fera point un pas pour retourner dans l’occident (en Chine) et manquer ainsi à sa résolution première. »

À ces mots, Wang-Siang fut ému d’un sentiment de pitié. « Maître, lui dit-il, votre disciple s’estime fort heureux de vous avoir rencontré. Comment oserait-t-il ne pas se réjouir avec vous ? Mais, dans ce moment, vous êtes brisé de fatigue ; reposez-vous en attendant le jour. Je vous conduirai moi-même et vous montrerai la route. »

À ces mots, il secoua une natte et l’y installa.

Au lever du soleil, le Maître de la loi ayant pris un