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appela un baiser que je rendis en feignant de vouloir m’échapper : mais, hélas ! tous les deux électrisés par ce baiser, nous ne pûmes attendre pour sceller notre union que nous fussions sous un ciel étranger. Ce fut le ciel du lit de ma mère qui reçut mes soupirs confondus avec ceux de mon amant. Cette fois grâce aux monstrueux efforts du Père Jérôme, je connus le plaisir, car Fargès n’était heureusement pour mes appâts que d’une conformation mitoyenne.

Il n’est point de plaisir sans amertume. Je dis plaisir, car les sens en procurent de très vifs, malgré que le cœur ne soit pas de la partie. On se ressouvient sans doute que le mien était vide ; il l’était même alors que Fargès s’efforçait de remplir l’autre. Sur ce lit où ma mère recevait les étreintes amoureuses de son cher major, lui et moi nous étions dans la délicieuse attitude de deux amants qui viennent d’être heureux, qui le sont de la courte trêve qu’ils font à leurs plai-

  
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