poussassent même la plaisanterie jusqu’à
me dépouiller de mes effets ; je
résolus donc de quitter sur le champ
Utrecht ; ce que j’appris des excès que
les Prussiens avaient commis ailleurs,
me confirma encore dans cette résolution.
Après avoir mis dans un coffre tous mes
meilleurs effets, je sortis avec un portefaix
que je pris pour le transporter, et
je me rendis d’abord chez Sophie dans
le dessein de l’engager à m’accompagner,
mais j’appris qu’elle était partie sur la
nouvelle de l’arrivée des ennemis ; je fus
fâchée d’être sitôt séparée de cette fille,
pour laquelle je m’étais senti beaucoup
d’amitié. Quoique toutes les portes de la
ville fussent déjà occupées par les Prussiens, je
parvins à sortir sans opposition ;
à une demi lieue d’Utrecht, je pris une
voiture qui me conduisit jusqu’à La
Haye. En arrivant dans cette résidence
du Stathouder, à peine me restait-il un
louis, mais ce défaut d’argent ne m’affligeait
point, les revenus d’une femme
sont en elle-même, me disais-je ; elle
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