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l’abandonné.

— Mais à quoi bon ? demanda le reporter.

— On ne sait pas. Faut voir ! »

Et sur cette réponse, il fut décidé qu’une embarcation serait construite, de manière à pouvoir prendre la mer vers le mois d’octobre prochain, au retour de la belle saison.


CHAPITRE X


Construction du bateau. — Deuxième récolte de blé. — Chasse aux koulas. — Une nouvelle plante plus agréable qu’utile. — Une baleine en vue. — Le harpon du Vineyard. — Dépeçage du cétacé. — Emploi des fanons. — La fin du mois de mai. — Pencroff n’a plus rien à désirer.


Lorsque Pencroff s’était mis un projet en tête, il n’avait et ne laissait pas de cesse qu’il n’eût été exécuté. Or, il voulait visiter l’île Tabor, et, comme une embarcation d’une certaine grandeur était nécessaire à cette traversée, il fallait construire ladite embarcation.

Voici le plan qui fut arrêté par l’ingénieur, d’accord avec le marin.

Le bateau mesurerait trente-cinq pieds de quille et neuf pieds de bau, — ce qui en ferait un marcheur, si ses fonds et ses lignes d’eau étaient réussis, — et ne devrait pas tirer plus de six pieds, calant d’eau suffisant pour le maintenir contre la dérive. Il serait ponté dans toute sa longueur, percé de deux écoutilles qui donneraient accès dans deux chambres séparées par une cloison, et gréé en sloop, avec brigantine, trinquette, fortune, flèche, foc, voilure très-maniable, amenant bien en cas de grains, et très-favorable pour tenir le plus près. Enfin, sa coque serait construite à francs bords, c’est-à-dire que les bordages affleureraient au lieu de se superposer, et quant à sa membrure, on l’appliquerait à chaud après l’ajustement des bordages qui seraient montés sur faux-couples.

Quel bois serait employé à la construction de ce bateau ? L’orme ou le sapin, qui abondaient dans l’île ? On se décida pour le sapin, bois un peu « fendif », suivant l’expression des charpentiers, mais facile à travailler, et qui supporte aussi bien que l’orme l’immersion dans l’eau.

Ces détails arrêtés, il fut convenu que, puisque le retour de la belle saison ne s’effectuerait pas avant six mois, Cyrus Smith et Pencroff travailleraient seuls au bateau. Gédéon Spilett et Harbert devaient continuer de chasser, et ni Nab,