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bon. Et moi qui ne voulais pas manger de fromage parce qu’il y avait des vers, et qui aimais mieux qu’il n’y eût pas de mouches dans l’huile !

Jeanneton est partie en refusant encore un verre de vin que ma mère lui offrait en signe d’adieu.

« Jacques, m’avait-elle dit, va chercher la bouteille qui était pour faire du vinaigre, tu sais, qui avait des fleurs. »

Jeanneton a refusé.


On remplace Jeanneton par Margoton.

Mais la maison est connue maintenant pour les distributions de nerfs, de peaux et de gras cuit. Margoton fait ses conditions en entrant.

« Moi, je n’ai pas les poumons faibles, dit-elle, et elle se donne un coup de poing dans l’estomac, un gros estomac qui danse dans sa robe d’indienne ; je n’ai pas les poumons faibles et j’aime la viande ; je veux manger chaud. »


Margoton joue gros jeu.

Mais Margoton vient de la part de la femme du proviseur, et l’estomac de Margoton est protégé comme les reins du petit Vingtras. L’autorité veille dans le corsage de la bonne comme dans la culotte de l’enfant. On ne destituera pas publiquement monsieur Vingtras parce qu’il flanquera en passant une roulée à son rejeton, ou parce qu’il étouffera sa bonne avec des chicots de boulettes ou du gras de mouton ; mais il fera bien tout de même de ne pas déplaire au