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« À votre santé ! » font-elles après avoir versé une goutte, une toute petite goutte au fond de leurs verres.

Elles ont rempli le mien jusqu’au bord.

Je crois que je suis un peu gris. — Gare à vous ! cousines.

C’est qu’en effet j’ai un toupet du diable, une audace d’enfer !


Elles ont voulu me faire voir le verger. Va pour le verger ! et j’y entre en sautant par-dessus la barrière à pieds joints.

Voilà comme je suis, moi !

Mes cousines me regardent ébahies, je ris en revenant à elles pour leur tendre la main et les aider à enjamber. Une, deux, voyons !

Elles poussent de petits cris et me retombent dans les bras en mettant pied à terre ; elles s’appuient et s’accrochent, et nous allons dégringoler ! Nous dégringolons, ma foi, on perd tous l’équilibre, et nous tombons sur le gazon. Elles ont des jarretières bleues.

Comme il fait beau ! un soleil d’or ! De larges gouttes de sueur me tombent des tempes, et elles ont aussi des perles qui roulent sur leurs joues roses. Le bourdonnement des abeilles qui ronflent autour des ruches, derrière ces groseilliers, fait une musique monotone dans l’air…


« Qu’est-ce que vous faites donc là-bas ? crie une voix du seuil de la maison. »

Ce que nous faisons ?… Nous sommes heureux, heu-