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Cambresier, se travestit ici en ain ou en ein : contain (content), contrusain (contresens), contrutain (contretemps), contruvain (contrevent), covein (couvent), sain (cent), essain (encens). Cette défiguration ajoutée aux autres produits, comme on voit, de véritables monstres que phonétistes et analogistes repousseraient avec horreur.

[Le signe y.]

La semi-voyelle y est employée par Remacle non pour y ou iy comme en français, sauf peut-être dans les seuls mots studyan (étudiant) et pryess (= priyès, prêtre), mais pour yi : foy doit se lire foyî ! Kiv’ zayss doit se lire ki v’s ayîs’ !

[Consonnes.]

En dépit du français, qu devient ku, kou : kouatt (quatre), kouarti (quartier), kouinz (quinze), kuitté (quitter). — K remplace le c dur, pour cause de wallonisation : akademeie, akâblé, koreg, kossin.

La lettre j est supprimée, et remplacée par g. Cette simplification a donné naissance à des graphies dans ce goût : gens devient geain, jaloux : gealo, jour : geou ; et, quand il s’agit de rendre j suivi de u, on aboutit aux exhilarantes graphies qui font si mal prononcer le mot français gageure : on trouvera donc geu se prononçant ʤœ̆́ (jeu), puis geuss = ʤus (juste) et geuniess = ʤunyès (genêt).

La morphologie de Remacle, malgré sa grammaire de 48 pages, sera suffisamment caractérisée par les exemples suivants, sans autre explication :

poss fé rir : pour se faire rire.

fé kouatt-reur : litt. faire quatre heures, goûter ; no-zavan, vo-zavé, nous avons, vous avez ; l’on-tabîmé, l’ont abîmé. Singulière idée de détacher la consonne finale sonore d’un mot pour l’accoler au mot suivant !

G’imm = ji m’ ; d’imm = di m’ ; t’inn = ti n’ (tu ne), s’iateg = si atètch.

Crop et saintt = crop-ès-cend ; dè bel et manîr = dès bèllès manîres. Après ce dernier exemple il faut tirer l’échelle. Voir une conjonction et dans la désinence du pluriel, entre un