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patois est conséquent ; en disant sau, il nomme Sausseray, Saulxures les villages où il y avait des puits salants ou des entrepôts de sel. Est-ce de saule que notre langue a formé saussaie ? n’est-ce pas du patois, qui a le primitif sausse ou sauce ? [1] Le patois nous semble donc avoir été bon à quelque chose. Mais laissons de côté les sottes accusations de barbarie, d’ignorance, de grossièreté, et voyons notre sujet.

Je ne considérerai de la langue du moyen-âge que les mots qui ne sont pas restés dans le français moderne, ou dont la forme s’en écarte plus ou moins, et j’en rapprocherai notre patois. Si je choisissais seulement par ci et par là quelques expressions rustiques qui s’y rapportent, la comparaison serait trop facile ; avec une petite liste ainsi préparée, on triompherait à bon marché. D’ailleurs la chose a déjà été faite partiellement ou indiquée. Mais je ne veux pas agir ainsi. Je suivrai seulement ligne à ligne une ou deux des pièces patoises qu’on a eues sous les yeux ; on verra que le patois est la langue du 12e et du 15e siècle, se modifiant avec l’âge et les circonstances.

Dans La manière de demander une femme en mariage (du Ban-de-la-Roche), je trouve une vingtaine de mots de la plus vieille époque ; le titre seul m’en offre trois, nôvelle, mouonné, mottée.

  1. L’espagnol dit aussi sauce ; c’est le vrai mot français formé très régulièrement du latin par la suppression de la syllabe non accentuée.