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ANNÉE 1916

moi la grande épreuve de degré et de qualité, la vie réelle de l’émotion.

À Rachilde. — Ces criminels étourneaux parlent des « passions humaines », mais où sont les passions humaines dans cette course à l’héroïsme et au sacrifice universel ? Et la conclusion sacrilège qu’ils tirent de ce déchirant martyre c’est que « l’homme est un loup pour l’homme » !


27 nov.

À M. de F… — Pour la paix, ma pauvre amie, je me demande comment il faut s’exprimer pour arriver à se faire comprendre, et je serais bien révoltée d’une pareille méconnaissance du pacifisme, de la guerre et des hommes devant la guerre, chez un prélat chrétien, si je ne savais que sa mission en ce monde est autre que celle de penser. Le pacifisme n’a jamais été, désarmer devant l’agresseur, ce serait le suicide, mais désarmer l’agresseur. Quant à parler des passions humaines dans une guerre comme la nôtre, c’est un véritable crime de lèse-héroïsme. Où sont les passions humaines dans ce martyre volontaire de tous les peuples ? La guerre par raison d’État ne sert aucune passion humaine, elle sert une idée fausse : Voilà pourquoi, le jour où les pacifistes seront revenus du champ de bataille,