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XXXIV
PRÉFACE

Les lignes qu’on vient de lire dans lesquelles on assiste à une tentative, rare chez un si jeune être, d’essor psychologique, n’évoquent-elles pas l’image d’un petit oiseau essayant ses ailes encore maladroites aux alentours de son nid ?

Voici, à la date du 20 Juin 1889, l’exposé d’une indifférence dans laquelle nous ne la verrons pas persévérer :

… Cependant, nous demeurerons toujours dans le cœur de ceux qui nous auront aimés. Il est vrai qu’eux, à leur tour passeront ; mais alors, que notre souvenir soit gardé ou non, ici bas, dans la mémoire des indifférents, qu’est-ce que cela nous importera ? Nous passerons du cœur dans la mémoire, de la mémoire dans l’oubli, et les cercles qui se seront formés au-dessus du gouffre qui nous aura engloutis seront remplacés par un calme plat.

Peu à peu le journal d’enfant nous achemine vers le journal de la jeune femme. Voici ce qu’elle écrit le 24 Juin 1889 :

Je lis avec énormément d’intérêt le récit d’une sœur : Oh ! la vie de famille, la vie de famille, avec ses joies même avec ses douleurs, comme je l’aime !

… Ce livre est très triste, c’est pour cela que je l’aime tant, mais j’aime ce qui est triste parce que c’est ce qui est vrai, et puis il faut que j’essaye de