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JOURNAL DE MARIE LENÉRU

Bien qu’ils soient maîtres de leur effort, ils s’embarrassent et se congestionnent. Le travail évidemment les alourdit, c’est une digestion avec les symptômes de l’autre. Est-ce que sont écrites ainsi toutes les choses souveraines ?

Et les hommes du métropolitain à 9 heures et à midi, ces messieurs bien habillés, oui, même celui qui m’offre sa place… On prévoit les événements qui « chifferaient » leurs âmes comme des loques, les mots qui feraient pleurer leur amour-propre. Que de places à prendre parmi les hommes !

On relira indéfiniment dans les romans ces réclamations des jeunes contre la vie, des enfants illégitimes entre autres, quand ils ont envie de se suicider : qu’ils n’ont pas demandé à naître, et pas seulement de leurs parents, mais de chaque ancêtre qui, dès les commencements du monde, les préparait. Car sans les générations qui devaient venir, sans la « volonté de vivre » de leur race future, aucun n’aurait connu le mal de l’espèce, et personne n’a le droit d’ignorer la plus absolue des solidarités, personne ne peut se séparer pour récriminer et condamner, et tout le monde est coupable ici, jusqu’à la sonnette du président !