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ADOLPHE WILLETTE

manifestant son individualisme dans mille dessins dont la plupart sont de purs chefs-d’œuvre et dont la collection devrait être précieusement réunie dans un musée, et l’État le laisse de côté, le rare et cher artiste, il l’ignore, il n’exige rien de sa palette parfumée, il le couvre de son dédain ! Quelle pitié !

Ah ! rêveur, je ne m’étonne pas que ta chanson, toute imprégnée pourtant de grâce et de jeunesse, s’embrume parfois de désespérance ainsi qu’un crépuscule d’hiver ; je ne m’étonne pas qu’une goutte de fiel soit mêlée au joyeux vin de France moussant dans ton verre ; je ne m’étonne pas qu’on te sente hanté par les angoisses des vaincus ; je ne m’étonne pas que tu aies trouvé, une nuit de deuil, cette légende, grande comme la douleur, qu’un de tes loqueteux jette au Christ, en lui montrant le poing : Descends donc de ta croix, eh ! feignant ! Tu as compris, tu as rendu la souffrance en souffrant, et ton talent plus tendre, plus apitoyé, d’une philosophie plus pla-